Après six ans d’une Révolution sanglante, la France fut dans une position critique. Depuis trois ans, elle dut se défendre au Nord, à l’Est et dans les Pyrénées contre les monarchies coalisées. La valeur de ses jeunes généraux et des soldats de l’An II permit toutefois de contenir les royalistes et l’invasion. Mais les difficultés internes de la Convention « thermidorienne » ne lui permirent pas d’appréhender à sa mesure la contre-révolution royaliste et notamment la stratégie adoptée à Londres par le comte d’Artois et ses bailleurs britanniques ; fabrication de fausse monnaie, instigation des guerres de Vendées et de Bretagne.
A la fin, assaillie de toute part, la Convention confia sa défense, in extremis, le 12 vendémiaire à un certain général Bonaparte dont le départ en Turquie a été retardé*. Pendant la fameuse journée du 13 Vendémiaire, qui sauva la 1ère République, ce général trouva sous ses ordres une troupe de soldats obéissants et aguerris.
Impressionné par l’action de la Garde conventionnelle, il lui fit former la tête de colonne lorsqu’il déboucha dans la rue Saint-Honoré à Paris par ce qui était l’impasse du Dauphin.
La compagnie de grenadiers, entre autres, se fit remarquer tant par son intrépidité que par son humanité. On vit des soldats secourir, une fois que la poudre se fut tue, des blessés du camp adversaire mais aussi des femmes et des enfants que la curiosité avaient attirés au milieu de cette lutte fratricide. Bonaparte cita dans son rapport les grenadiers : Brossard, Laudier, Goubert, Flackmann et Auberger. Il furent les premiers d’une très longue liste de braves et c’était le début d’une aventure épique écrite à l’encre de l’honneur et de la gloire mais aussi des souffrances silencieuses et d’une abnégation sans faille et désintéressée.
*Un dénommé Letourneur eut l’idée de revoir les dossiers des officiers jacobins et tomba sur celui du héros de Toulon. Le 29 fructifor de l’An IV, le Comité de salut public, présidé par Cambacérès, rendait deux arrêtés par lesquels le général Bonaparte, pour avoir refusé de se rendre à son poste (alors l’Armée de l’Ouest), était rayé de la liste des officiers généraux employés et autorisé à se mettre au service de la Turquie.